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La rationnalité de l’acteur contre la logique du don ?

La croyance en la rationnalité de l’acteur est de nos jours largement propagés dans les esprits. Nombres de personnes pensent que la rationalité de l’acteur, laissée libre de toute contrainte étatique, petit à petit fragmente la société et détruit les liens sociaux. D’autres croient que la liberté de l’individu n’est pas antinomique à la logique du don mais critique cependant l’utilitarisme.

L’homo economicus s’oppose t-il à l’homo donnator ?



La rationnalité de l’acteur

Pour les économistes classiques (Smith, Ricardo…) et néo-classiques, l’individu est rationnel. Il est affranchis de toute norme et toute contrainte social. De plus, l’individu est calculateur, il est capable d’optimiser son bien être. Il passe son temps à calculer. Il en ferait résulter un certain équilibre sur le marché entre l’offre et la demande. Ce comportement conduit nécessairement à une optimum social, rationnel et utilitariste. C’est l’homo economicus.

Herber Simon, socioloque économiste, va critiquer le modèle néo-classique et le reprendre pour l’enrichir. Il distingue deux types de rationnalité: la rationnalité substantive et la rationnalité procédurale. La rationnalité substantive conditionnerait que l’individu ait à sa disposition une information parfaite afin de prendre les décisions les plus rationnelles possible. Sauf que, bien souvent, l’information est opaque, imparfaite, par conséquent les décisions prisent par les individus ne sont pas les meilleures. Ils se contentent donc d’une satisfaction minimale. Ce que Simon appel la rationnalité procédurale.

Pour Keynes, il est évident que nous n’avons pas à faire à des comportements maximisateurs et rationnels. Sinon, comment expliquer les déséquilibres sur les marchés ? Keynes explique que sur les différents marchés les individus se comportent de manière mimétique qui conduisent à des déséquilibres quand leur choix est mauvais…

Le dons, une logique anti-utilitariste ?

Comme nous l’avons vu précédemment, dans les théories dominantes, l’individu est souverrain. C’est un homo-economicus. L’homo-donator est-il typique des sociétés primitives ?

Une société primitive d’un point de vu démographique est limité. Leur organisation politique se fait bien souvent sans état. Ce sont des sociétés d’abondance malgré une technologie peu avancée, donc leur survie est assurée. Les principales caractéristiques des échanges dans ces sociétés, d’après le sociologue Marcel Mauss(l’essai sur le don), ne sont pas utilitaire. On s’aperçoit que les échanges ne correspondent pas à une logique de troc. En effet, les échanges obéiraient à 3 lois:

  • Obligation de donnée

  • Obligation de recevoir

  • Obligation de rendre

Contrairement à nos sociétés, il n’y a jamais d’équivalence dans les échanges. Celui qui va recevoir le plus ne sera pas gagnant. Moins l’individu calcul, plus il sera reconnu socialement. La richesse est dans la perte, dans la dépense. C’est une forme de diplomatie social.

Rendre est une obligation. Mais il est impératif de ne pas rendre immédiatement. Cela serait vécu comme une forme d’impolitesse. L’autre sait que l’on va rendre, mais il ne sait pas quand. Il est important de rendre autre chose ou alors d’avantage. L’échange est donc non équivalent. Si quelqu’un rendait exactement la même chose que ce qu’on lui a donné, cela abolirait la dette. Si cette obligation est abolie, alors cela met fin à la relation social. On s’aperçoit alors que les échanges ne sont pas de biens, mais entre individus, entre sujet.

L’échange symbolique d’après Mauss s’oppose donc à l’accumulation de richesse. Pour donner, il faut posséder, mais les primitifs ne cherchent pas l’accumulation de richesse. L’échange symbolique est donc rigoureusement non utilitaire.

Alain caillé parle d’échange anti-utilitaire qui refuse le calcule. Pour lui, c’est une logique de total désintéressement. Elle est présente dans toutes les dimensions de la société, politique, économique, religieuse… Toute conduite utilitariste est jugé très négativement par la société. Cela signifie, dans ce cas, l’homo-economicus n’est pas une réalité. Si on était socialisé dans une autre société, on aurait un autre comportement.

D’après Sallins, il y a plusieurs types de réciprocités:

  • La réciprocité généralisée

Caractère altruiste, don pur. Pas d’attente de l’autre pour donner. Celui qui donne le plus est le plus valorisé. Pas d’enjeu utilitaire. Simple enjeu, instaurer la relation sociale.

  • La réciprocité équilibrée

La relation sociale et le caractère matériel importe au moins autant. Pas de flux uni-directionnel. Sensible au bien qui est échangé. Les échanges sont plus simultanés.

  • La réciprocité négative

La réciprocité est impersonnel. L’intérêt matériel prime. L’individu recherche sa satisfaction.

Forme non-social (Filouterie, astuce, violence, ruse…)

Frédéric Lordon critique la théorie de Caillé. Il se donne comme objectif de dépasser l’opposition entre l’homo-donator et l’homo-economicus. Il va réfléchir sur la notion d’intérêt. Il pense que l’intérêt n’est pas réductible à l’intérêt matériel. Il invente donc la notion d’intérêt conatus: C’est l’intérêt qu’à chacun d’entre nous de persévérer dans son être, intérêt d’exister de manière active. Il n’est pas strictement utilitaire, il s’agit de l’intérêt à exister. Pour affirmer sa puissance, on décide d’être attentif à autrui alors que dans la logique économique autrui importe peu. L’idée de Lordon est qu’en réalité il y a un intérêt à être désintéressé. On ne peut donc pas parler de désintéressement.

Le don est une forme d’échange qui permettrait d’éviter les catastrophe. C’est une mise en forme social. Le danger viendrait de la question du prendre. Si l’élan pronateur du conatus est au fondement de la violence, alors on bien la nécessité qu’il y a dans chaque société de mettre en forme les relations sociales. Aujourd’hui, pour réguler les conflits on a l’état. Dans les sociétés primitive, l’état est absent, le don serait une façon de le remplacer. D’après Lordon, la mise en place de l’état social serait un moyen pour l’individu de persévérer dans son être et éviter les affects négatifs.

Conclusion

Après ces explications, on peut s’interroger s’il ne serait pas positif pour notre société de se tourner vers une culture du don. Mais cette culture n’est-elle pas déjà en train de se développer ? Les politiques néo-libérale appliquées ces trentes dernières années tendent naturellement à un état svelte ou à la diminution de l’état social. Pour parfaire à la réciprocité négative imposée par le système marchand et aux misères humaine que cela engendre, le monde associatif se développe. On peut également pensé à la prodigieuse ascension de la culture du logiciel libre qui s’applique ce principe de réciprocité généralisé décrit par Sallins.

La profusion de l’information sur internet favoriserait-il le don ? Ca ne fait aucun doute. Quoi qu’il en soit, on peut à juste titre s’interroger des impactes qu’aura cette culture montante sur notre société marchande.

13 commentaires pour “La rationnalité de l’acteur contre la logique du don ?

  1. J’aime bcp ta deuxieme partie! Trés bien expliquee
    En revanche, la premiere je la trouve trOp éloignée du texte.
    Mais Merci de ce don ^^
    Bisous

  2. En fait… C’est le cours sur la rationalité de l’acteur. Donc oui, c’est hyper synthétique et assez éloigné du don.

  3. Merci bien Atonin. Ton prestige social ne fait qu’augmenter de jours en jours…
    J’avais déjà lu ça dans ton cours généreusement mis en libre accès sur le forum. (attention tout de même au partiel ecrit, pour les fautes d’orthographe…. il yen a plus de 150 sur la totalité du cours :P)

    Bonne chance pour demain.

  4. j’ai laissé quelques fautes dans mon commentaire…
    Seras tu capable de les rettrouver ? ^^

  5. Pfff… 😉

    Je suis sur t’as fais ça sous word qui a souligné les noms propres !
    Y en a même pas 150 ;-p

  6. oua bon boulot
    jespére que j’aurais une bonne note grâce à toi
    d’abord c’est même obligé
    a demain

  7. Je découvre des trucs tous les jours sur ce blog*…
    « dépasser l’opposition entre l’homo-donator et l’homo-economicus en recherchant l’intérêt conatus » voila un aspect programmatique à développer!

    Par contre « Les politiques néo-libérale appliquées ces trente dernières années tendent naturellement à un état svelte ou à la diminution de l’état social. » euh, AMHA, le modèle nordique d’Etat (avec une majuscule!) est plutôt ce qui sauve le social dans un cadre libéral (bref, la social-démocratie), plutôt que l’inverse.

    (*surtout depuis qu’il est devenu Connexion Démocrate, lol)

  8. La social démocratie est quand même une politique néo-libérale puisqu’elle s’appuie d’avantage sur les mécanismes du marché. (sans connotation négative)

    Rechercher l’intérêt conatus, oui. Très concrètement, il faudrait promouvoir des échanges symboliques. On peut prendre comme exemple bookcrossing ou les sites de dons comme gooduse.org. Je pense qu’internet est un espace où la réciprocité généralisée est en plein essor. Le programme démocrate doit aussi promouvoir le désintéressement en le faisant coexister avec l’utilitarisme.

  9. Intéressant, ton article nin nin !
    Mais ne sommes pas, structurellement parlant, déjà dans une société du don ? Comme toutes les sociétés d’ailleurs.. Je veux dire du don à la Mauss, jamais désintéressé..

  10. Si j’ai bien tout compris, tu as tellement de devoirs (en abondance) que tu en fait don sur le web ? :p

    En tout cas, c’est super sympa d’utiliser le « libre » autre que pour l’informatique mais pour tout ce qui est « connaissances ». Tu devrais mettre un « Creative commons » néanmoins…

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