N’étant pas à la conférence nationale, je n’ai eu l’occasion de suivre le discours de clôture de François Bayrou en directe, cependant, grâce à France Démocrate et Marie-Anne Kraft, je peux en avoir un assez bon résumé.
Ce billet n’a pas pour but de faire la promotion du Mouvement, mais simplement poser des questions qui me semblent essentielles.
Pour être franc et sans complaisance, je n’ai rien trouvé de révolutionnaire à ce discours.
L’opposition entre capitalisme et humanisme est heureuse mais elle me semble un peu creuse dans les faits. Le capitalisme est avant tout un système d’organisation économique tandis que l’humanisme est une éthique. La remise en cause doit être menée au niveau des valeurs ET du système d’organisation économique. J’aurai plutôt eu tendance à opposer l’éthique protestante, qui a su conquérir le monde ces deux derniers siècle avec le capitalisme, à l’humanisme Chrétien qui est en train de ressurgir comme un fantôme du passé.
Je rend hommage à la distinction entre capitalisme et libéralisme. En ces temps de crise où la gauche fustige le libéralisme par automatisme, sans réfléchir à son sens premier, il est bon de rappeler que les zélés partisans d’une déréglementation totale des marchés et d’un individualisme absolue sont les néo-libéraux, ou devrait-on les appeler, les néo-capitaliste.
Je salut l’ode aux valeurs immatérielles et à la spiritualité, cependant, je m’interroge sur leur traduction concrète dans le programme politique. Si la seule réponse est de garder le dimanche comme un jour réservé à la famille, je trouve ça un peu léger, voire insultant pour les religions qui n’ont pas les mêmes dogmes. De plus, ce n’est pas le rôle du politique de se référencer à la religion, même implicitement.
Je crois évidemment beaucoup à une révolution des valeurs, mais en ces périodes de trouble, ne devrait-on pas proposer des réformes structurelles d’envergures compatible avec les valeurs humanistes ? Je crois que nous souffrons d’une carence intellectuelle à ce niveau qui est gravissime. A force d’osciller entre deux systèmes qui ne fonctionnent pas, le Capitalisme et le Marxisme, nous ne pensons plus autrement.
Un leader politique, aussi cultivé soit-il, ne peut pas inventer un nouveau modèle en faisant appel à sa rhétorique. Il nous faut construire une idéologie alternative.
La politique qui consiste à favoriser les capitaux des PME est une réponse capitaliste et non pas libérale ou humaniste. Entendons-nous, cela reste une des réponses les moins pire dans un cadre capitaliste.
N’est-ce pas l’entrain qu’ont les hommes a toujours plus accumuler les capitaux économiques qui entraîne la ruine du système ?
La culture du don doit être réhabilitée. La valorisation de l’intérêt général doit être encore plus qu’avant une priorité. La tentation étatiste qui est une déshumanisation de la société doit être combattue, même en ces temps de crise. La co-création et les entreprises coopératives doivent être encouragées (le libre est un parfait exemple) pour une production des richesses plus respectueuses des hommes et de la démocratie.
Je ne me ferais surement pas d’amis en écrivant ces quelques lignes, mais j’attendais une réponse plus concréte de ce discours. En fait, idéologiquement, nous en sommes quasiement au même point qu’il y a deux ans et c’est assez décevant.
« J’aurai plutôt eu tendance à opposer l’éthique protestante, qui a su conquérir le monde ces deux derniers siècle avec le capitalisme, à l’humanisme Chrétien qui est en train de ressurgir comme un fantôme du passé. »
Permets-moi de te contredire. Déjà les protestants sont chrétiens… alors j’ai du mal à saisir comment tu peux opposer ces deux morales. D’autant plus que l’éthique protestante porte en elle capitalisme et humanisme. L’éthique protestante est justement ce qui les relie. C’est d’ailleurs là où tu aurais pu critiquer l’opposition faite par Bayrou entre capitalisme et humanisme.
Mais surtout, il faut que tu fasses un peu plus confiance à Bayrou sur ce plan, car c’est l’un de ses domaines privilégiés. Il sait mieux que toi et moi de quoi sont constitués les passés et les éthiques du capitalisme et de l’humanisme.
Il élève la réflexion en parlant de PROJET. Parce que le capitalisme est un fonctionnement (là-dessus tu as raison), il ne doit pas être érigé en projet. Parce que l’humanisme est un mouvement profond (il est plus qu’une éthique à mon avis) , il peut se concrétiser dans un projet de société.
(j’espère ne pas avoir eu un ton trop péremptoire dans ma réponse quand même 🙂
J’ajoute que dans l’aide apportée aux PME, je ne vois pas l’aide au système capitaliste (même si ça l’est indirectement).
Je vois surtout une aide à l’économie réelle, à la production, à l’emploi. Ne pas aider les PME n’est pas seulement laisser « dans la mouise » nos voisins, nos familles… , mais toute notre société !
« Il sait mieux que toi et moi de quoi sont constitués les passés et les éthiques du capitalisme et de l’humanisme. »
Ok, donc, je me tais et j’écoute ?
J’admets que je ne connais pas le sujet à fond, cependant, l’humanisme est un concept très large qui a différent sens suivant les civilisations. Quand j’ai parlé d’humanisme chrétien, j’aurais dus parler d’humanisme catholique qui ne répond pas au même valeur. M’enfin, je n’approfondirais pas ce sujet par peur de dire d’autres bêtise.
Ce qui est sur, c’est que Mouvement Démocrate n’est pas un promoteur de l’éthique protestante et donc il s’oppose par nature au système capitaliste.
Brandir un projet humain, c’est jolie, c’est généreux et rassembleur, mais notre projet est fondé dans un cadre capitaliste et je ne vois rien concrètement qui puisse ouvrir la porte à autre chose.
Je pense que le Mouvement Démocrate doit continuer de nourrir sa réflexion, le projet n’est pas mure.
Tu as raison de ne pas te taire, effectivement!
Ma peur de passer pour péremptoire s’est hélas révélée fondée 🙁
En fait je me demandais en lisant ta note si tu parlais d’opposition entre valeurs catholiques et protestantes. Tu affirmes dans ton commentaire que oui. Encore une fois je ne suis pas tellement d’accord avec toi. Si tu te réfères à l’œuvre du sociologue allemand Weber (que je n’ai pas lue, mais dont j’ai seulement entendu parler à la fac il y a longtemps), je comprends que tu soulignes cette différence. Seulement beaucoup de temps a passé depuis.
Je ne pense pas que l’on puisse fonder un projet aujourd’hui en se référant au catholicisme en l’opposant au protestantisme. Il faut, et tu seras d’accord sans doute fonder un projet humaniste œcuménique (dans le sens « universel », pas dans le sens « rapprochement des religions » même si ça en fait partie)
Sur le projet Démocrate, je suis d’accord à 200% avec toi:
il n’est pas mûr; il faut continuer de nourrir sa réflexion. Il faut le faire quitter son cadre capitaliste.
Je suis prêt comme toi à « ne pas me faire d’amis » en écrivant cela 🙂
Autre chose :
On va me taxer de QuitterieDelmas-fan, mais tant pis!
Elle est la seule responsable MoDem qui prône fidèlement le développement de l’économie sociale et solidaire. Pour ma part, j’appelle cela une « ouvrir une porte à autre chose ». Et les valeurs de cette économie sont souvent de l’ordre de « la culture du don ».
Ça me fait penser qu’il faudrait réfléchir aux points communs entre les défenseurs du libre et les porte-voix de l’E.S.S.
Qu’en penses-tu?
– » L’individu ne peut avoir raison indéfiniment contre l’humanité. «
Jules Romain (Louis Fargerule dit ) 1885-1972.
Bonne journée à tous,
Danielle Th.
Pas de soucis Guillaume :p C’est aussi ça le débat, on se titille, ça permet de faire ressortir ce qu’on pense vraiment.
Oui, je fais bien sur référence à weber, mais pas seulement, Braudel également.
Je ne pense pas qu’il y ai une quelconque opposition entre la religion protestante et la religion catholique, cependant, les valeurs que ces religions ont diffusé sont différentes. C’est uniquement par rapport à leur système de valeur que je les oppose.
« Sur le projet Démocrate, je suis d’accord à 200% avec toi:
il n’est pas mûr; il faut continuer de nourrir sa réflexion. Il faut le faire quitter son cadre capitaliste. »
C’est juste cela que je veux dire avec ce billet un peu critique.
Quitterie a effectivement une approche intéressante et bien moins formatée que la plus part de nos responsables. J’apprécie ce qu’elle dit, elle se risque à aborder des systèmes de pensés différents, c’est tout à son honneur.
« les porte-voix de l’E.S.S. »
Qu’est-ce ? Première fois que je lis ces initiales.
@Fanal Safran,
Jolie citation, même si je pense que l’individualisme est un humanisme s’il a conscience du collectif.
L’individu premier et l’intérêt général ne s’oppose pas forcément.
Oui, tu as raison Antonin, alors je te rajoute quand même le début de l’article que j’ai publié sur différents sites bien avant cette journée du CN:
» Après le congrès de Villepinte, je me disais que le monde rêvé n’existe que si on le crée de toutes pièces soi-même et avec les autres, et qu’à vouloir le créer soi-même, on est condamné à prendre des risques avec les autres.
Pour nous tous, c’est un appel à la sagesse et à la responsabilité. Soyons humanistes .. nous dit François Bayrou.
Cela doit commencer en chacun de nous. Nous sommes copropriétaires en indivision de ce monde appelé Humanité, qui se donne sans discrimination. Cela ne peut se faire sans une véritable conversion des esprits. »
Voilà…. qu’en penses-tu ?
Bonne journée Antonin et à vous tous,
Danielle Th.
J’en pense du bien, évidemment. Ce sont de belles phrases pleines d’espoirs.
Mais cette révolution des valeurs qui est en train de se passer en chacun de nous, et probablement en beaucoup d’Européen, ne sera utile que si nous arrivons à la traduire intellectuellement puis politiquement.
@ Antonin
oui, j’avais hésité à préciser parce que je ne savais pas si ce sigle est utilisé ou pas (!) :
C’est tout simplement l’Economie Sociale et Solidaire.
Hum, il faut que j’en lise un peu plus mais ça me parait intéressant.